La bibliothèque enchantée - Mohammad RABIE

Editions Actes Sud - Collection Sindbad
Parution : janvier 2019
Titre original : Kawkab'Anbar
Traduction : Stéphanie Dujols
176 pages

Ce qu'en dit l'éditeur :

Chaher, jeune fonctionnaire du ministère des “Biens de mainmorte”, se voit confier une mission inhabituelle : rédiger pour la forme un rapport sur une bibliothèque oubliée du Caire que l’État veut raser pour faire passer une nouvelle ligne de métro. Il se décide pourtant à mener sérieusement son enquête et, peu à peu, tout un monde mystérieux et labyrinthique s’ouvre à lui dans cette bâtisse délabrée et poussiéreuse où les ouvrages sont entassés sans cotation ni indexation et où l’on trouve des traductions dans toutes les langues imaginables. 

Fasciné par l’étrange bibliothèque, il ne l’est pas moins par la poignée d’originaux qui la fréquentent, comme Ali, célèbre traducteur ayant perdu toute foi en son métier, ou “Jean le copiste”, homme mutique ayant passé sa vie à photographier des livres page après page et, surtout, Sayyid, vieil intellectuel nihiliste, cynique et truculent, qui connaît la bibliothèque comme sa poche mais n’est pas prompt à divulguer ses secrets.

Dans ce roman surprenant, Mohammad Rabie tisse d’une main de maître une double trame narrative. Entre la voix de Chaher et celle de Sayyid, son récit dévoile des franges de marginalité, loin de l’étau suffocant de la bureaucratie, et des strates de rêves et de légendes sous l’épiderme racorni de la ville.


Ce que j'en ai pensé :

A-t-on déjà vu plus étrange bibliothèque que celle-ci ? Oubliée au fond d'une rue, dérobée aux regards, et dont le système de rangement dépasse l'entendement ? Des milliers de livres, dans toutes les langues que parlent les hommes, posés là suite à des dons, et sur la première page desquels ont trouve le titre du livre qui le précède sur l'étagère, et sur la dernière page, le titre du livre rangé juste après.

De quoi dérouter les esprits les plus cartésiens et intriguer Chaher qui doit, par son rapport au ministère, influer sur le devenir du lieu.

On croise un vieil érudit, un copiste frénétique et un traducteur. Chacun à sa manière partage le charme du lieu et invite le jeune Chaheb à la réflexion sur la littérature.

C'est une belle balade à laquelle nous invite Mohammad RABIE, dans une Egypte sclérosée par l'administration et avide de "progrès" où subsiste encore cette petite bulle dédiée aux livres, hors du temps et loin de toute modernité, une faille spatio-temporelle qui échappe au classement et aux index.

La narration est délicieuse, comme souvent avec les auteurs égyptiens, elle s'enrubanne de poésie sans se départir d'un certain humour, d'une critique sous-jacente de la société cairote.

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