Les échoués - Pascal MANOUKIAN


éd Don Quichotte - 20 août 2015 - 304 pages

Ce qu'en dit l'éditeur :
« Le chien était revenu. De son trou, Virgil sentait son haleine humide. Une odeur de lait tourné, de poulet, d’épluchures de légumes et de restes de jambon. Un repas de poubelle comme il en disputait chaque jour à d’autres chiens depuis son arrivée en France. Ici, tout s’était inversé, il construisait des maisons et habitait dehors. Se cassait le dos pour nourrir ses enfants sans pouvoir les serrer contre lui et se privait de médicaments pour offrir des parfums à une femme dont il avait oublié jusqu’à l’odeur… »
1992. Lampedusa est encore une petite île tranquille et aucun mur de barbelés ne court le long des enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla. Virgil, le Moldave, Chanchal, le Bangladais, et Assan, le Somalien, sont des pionniers. Bientôt, des millions de désespérés prendront d’assaut les routes qu’ils sont en train d’ouvrir.
Arrivés en France, vivants mais endettés et sans papiers, les trois clandestins vont tout partager, les marchands de sommeil et les négriers, les drames et les petits bonheurs.

Pascal Manoukian est journaliste grand reporter, il a couvert 
la plupart des grands conflits qui ont secoué la planète entre 1975 et 1995.
Il est directeur éditorial de l'agence de presse Capa et auteur.

Ce que j'en ai pensé :
Avec l'actualité (souvent brûlante) en miroir, j'avais envie de découvrir ce roman qui évoque les destins entremêlés de quatre migrants (trois hommes et la fille de l'un d'eux) arrivés chacun d'une longue route de l'exil, chacun poussé par des motivations différentes (les chapitres consacrés à chaque personnage donnent une vision marquante des persécutions dont ils sont l'objet) et espérant trouver en Europe un avenir moins sombre.
Le livre, dont l'action se situe en 1992, offre d'intéressantes réflexions sur les conditions de voyage, sur la vie misérable et cette espèce d'esclavage qui les attend, mettant en perspective la fragilité de l'être humain, sa solitude, et parfois aussi, son extrême violence. Il met en exergue un système qui profite aux passeurs, aux employeurs, à d'anciens réfugiés, les rendant plus riches, plus vicieux. Une réalité bien sombre qui donne souvent à ce roman des allures de reportage. Un roman à lire pour savoir.
Si j'ai globalement aimé ce livre, sa narration, si j'ai été touchée par les histoires de ces migrants, par leur amitié et leur solidarité, je n'ai pas aimé certains passages qui tiennent plus du mélo : l'épisode final du chevreuil et des mulots m'a paru superflu. Dommage de finir sur cette anecdote un peu mièvre : le roman aurait gagné en intensité en restant sur quelque chose de moins "irréel". En ce sens, j'ai préféré Eldorado de Laurent Gaudé ou La mer, le matin de Margaret Mazzantini qui, quoique romancés eux-aussi, évoquent la vie des réfugiés dans un registre plus cru.
Je n'ai pas vu l'intérêt de situer le récit en 1992, au moment où le flux n'est encore qu'anecdotique alors que le cadrer en 2015 lui aurait sans doute donné plus de portée. Cela met malgré tout en perspective le peu d'espoir d'une évolution de la situation de ces réfugiés.


3 commentaires:

  1. Je partage ton avis sur les quelques passage plus mélos. N'empêche... je trouve que le tout demeure très bien ficelé. Et ne serait-ce que pour son actualité et la dure réalité qu'il représente, ce roman devrait être lu par le plus grand nombre. Surtout qu'il est très accessible.

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  2. J'ai envie de recopier le commentaire de Marie-Claude. Un passage m'a paru superflu et mou du genou. Pour le reste, c'est un texte qui m'a marqué au fer rouge.

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  3. Pareil que Jérôme et Marie-Claude !

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