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L'heure du retour - Christopher M. HOOD

 

Editions Sonatine

Parution : 4 avril 2024

Traduction : Héloïse Esquié

384 pages


Ce qu’en dit l’éditeur :

État de New York, dans quelques décennies. Bill et Penelope mènent une vie à peu près normale. Certes, leur pelouse a laissé place à un potager, et ils se nourrissent désormais de ses légumes. Ils ne dorment plus dans leur chambre, mais sur un matelas près de la cheminée. Quelques clients fréquentent encore le cabinet de psychologue de Bill, cependant ils le paient non plus en dollars mais en boîtes de conserve. Des lubies ? Non, simplement un virus venu des glaces de l’Islande qui a décimé le monde, privant les hommes d’à peu près tout, faisant disparaître dans son sillage les matières premières, l’ordre social et la civilisation. Lorsque Bill et Penelope apprennent que leur fille Hannah, coincée sur son campus en Californie depuis le début de l’épidémie, a rejoint un culte inquiétant appelé le Revival, le couple décide de traverser les États-Unis dans leur vieille Subaru pour voler à son secours. Mais sur un territoire en proie à l’anarchie, aux gangs et à la radicalité extrême, leur voyage va s’avérer pour le moins périlleux.

Ce que j’en ai pensé :

Roman post-apocalyptique, L’heure du retour s’inspire de la pandémie de Covid19 pour retracer l’histoire d’une famille séparée par un nouveau virus venu d’Islande qui a déjà tué les 2/3 de la population mondiale. Tandis que les parents survivent du mieux qu’ils le peuvent sur la côte est, leur fille, étudiante en Californie intègre une secte et semble les appeler au secours.

C’est le début d’un road-trip tour à tour angoissant ou cocasse qui va confronter Bill et Penelope (les parents d’Hannah) à ce qu’il reste de l’Amérique, au meilleur comme au pire. On croise donc un tas de survivalistes ultra-militarisés, des profiteurs en tout genre, de bonnes âmes généreuses, des groupes utopistes et pour finir, cette secte et son gourou, « l’homme sans nom ».

Cette dystopie m’a souvent semblé bien longue, comme si l’intrigue était ralentie par les atermoiements introspectifs du narrateur (Bill est psychologue de profession), ses pensées parasites. Le road-trip est un prétexte pour évoquer la parentalité, l’usure du couple, les relations homme/femme, le racisme et la violence...

La dernière partie prend enfin du rythme (c’est un peu tard, dommage..) mais en devient presque peu crédible.

Une bonne lecture malgré ses quelques défauts (c’est un premier roman).

Les dents de lait - Helene BUKOWSKI

Editions Gallmeister

Parution : 19 août 2021

272 pages


Ce qu'en dit l'éditeur :

Skalde et sa mère Edith vivent dans leur maison isolée à l'orée de la forêt. L'adolescente n'a jamais vu le bleu du ciel : leur région est en proie au brouillard et à la sécheresse depuis si longtemps. Les derniers habitants du coin, après avoir fait sauter l'unique pont qui les reliait au reste du monde, espèrent ainsi que leur autarcie volontaire les protégera du chaos. Un jour, Skalde découvre dans une clairière une enfant à la chevelure rouge feu. D'où vient-elle ? Comment a-t-elle pu arriver jusqu'ici ? Consciente de sa transgression, l'adolescente recueille la petite fille, sous le regard méfiant de sa mère Edith. Car les deux femmes ne se sont jamais vraiment intégrées à cette communauté pétrie de peurs et de superstitions. Tandis que les villageois s'organisent, le trio devra bientôt faire face à une véritable chasse aux sorcières.

 Ce que j'en ai pensé :

Un brouillard persistant, une sécheresse accablante, des animaux mourants, plus d'oiseaux, des arbres fruitiers improductifs. Le monde a vacillé et les hommes aussi.

C'est dans ce contexte apocalyptique que survivent Skalde, adolescente, et sa mère Edith, sur un coin de terre coupé du monde, jusqu'à l'apparition de l'enfant rousse, Meiris qui va bouleverser ce qui restait d'équilibre.

Étonnant premier roman qui semble volontairement laisser des zones d'ombre dans le récit : on ne saura pas d'où viennent l'animosité et la rancœur qui animent les relations mère-fille, ni d'où arrive l'enfant rousse, ni comment le monde a basculé..

Il ne faudra donc pas chercher de réponses, oublier le rationnel pour se laisser porter par ce récit en forme de journal intime, écrit par Skalde et qui interroge le lecteur sur nos peurs : celle de la l'inconnu, celle de la perte de repères et de certitudes. 

Helene BUKOWSKI peint avec justesse une communauté apeurée, au bord de la rupture et de la violence, guidée par ses superstitions (l'enfant rousse est-elle un elfe ?), par l'enjeu de sa survie face à une nature aussi cruelle qu'elle a pu être prolifique et bienveillante.

J'ai beaucoup aimé le ton et le rythme de cette dystopie dans laquelle les personnages semblent pourtant parfois "vides d'émotions" (le peu d'empathie dégagé accentue le côté sombre du roman, comme si les sentiments mouraient eux-aussi). J'ai apprécié le mystère persistant sur les origines et la fin ouverte qui laissent le lecteur libre d'imaginer les prémices et la suite de cette histoire.

Trois fois la fin du monde - Sophie DIVRY

Editions Noir sur Blanc / Notabilia
Parution : 23 août 2018
240 pages

Ce qu'en dit l'éditeur :

 Après un braquage avec son frère qui se termine mal, Joseph Kamal est jeté en prison. Gardes et détenus rivalisent de brutalité, le jeune homme doit courber la tête et s’adapter. Il voudrait que ce cauchemar s’arrête. Une explosion nucléaire lui permet d’échapper à cet enfer. Joseph se cache dans la zone interdite. Poussé par un désir de solitude absolue, il s’installe dans une ferme désertée. Là, le temps s’arrête, il se construit une nouvelle vie avec un mouton et un chat, au cœur d’une nature qui le fascine.

 Trois fois la fin du monde est une expérience de pensée, une ode envoûtante à la nature, l’histoire revisitée d’un Robinson Crusoé plongé jusqu’à la folie dans son îlot mental. Une force poétique remarquable, une tension permanente et une justesse psychologique saisissante rendent ce roman crépusculaire impressionnant de maîtrise.
  
« Au bout d’un temps infini, le greffier dit que c’est bon, tout est en règle, que la fouille est terminée. Il ôte ses gants et les jette avec répugnance dans une corbeille. Je peux enfin cacher ma nudité. Mais je ne rhabille plus le même homme qu’une heure auparavant. »

Ce que j'en ai pensé :

 Etonnante narration qui passe du "je" au "il" et qui déroule un morceau de vie d'un homme confronté à la solitude.
Solitude familiale (sa mère est morte et son frère s'est fait descendre lors du braquage d'une bijouterie), solitude sociale entre les murs d'une prison qui le dévorent tout entier, solitude dans un monde apocalyptique après la catastrophe nucléaire, solitude psychologique de l'ermite ou du misanthrope...
Solitude et besoin de contacts, capter une station de radio, domestiquer un bélier errant, retrouver le plaisir du contact avec Fine, la chatte rousse, et ses bébés.

Et la descente aux enfers dans un paradis de solitude, loin des hommes, une liberté comme une prison qui enrobe tout d'une poix grise, qui part un jour en fumée.
Trois fois la tragédie, trois fois la fin du monde, trois fois la renaissance aussi...

Malgré les étrangetés de la narration (et le bémol que j'émets sur l'utilisation du langage de banlieue pour transcrire les pensées ou les paroles de Joseph, et qui m'a semblé un peu artificiel et non indispensable), et du contexte (cette apocalypse nucléaire qui marque une frontière de contamination entre Nantes et Besançon et qui parait arriver un peu comme un cheveu sur la soupe et ne parait pas très crédible -un gêne immuniserait certains des radiations), j'ai beaucoup aimé la plume poétique de l'auteur (et ses descriptions de tous les verts de la nature, des oiseaux...) et le destin particulier de ce "Robinson" des temps modernes.

Un roman étonnant, à plus d'un titre !


Les buveurs de lumière - Jenni FAGAN

Editions Métailié
Parution : 24 août 2017
Titre original : The Sunlight Pilgrims
Traduction : Céline Schwaller
304 pages

Ce qu'en dit l'éditeur : 

2020.
Le monde entre dans l’âge de glace, il neige à Jérusalem et les icebergs dérivent le long des côtes. Pour les jours sombres qui s’annoncent, il faut faire provision de lumière – neige au soleil, stalactites éclatantes, aurores boréales.

Dylan, géant barbu et tatoué, débarque au beau milieu de la nuit dans la petite communauté de Clachan Fells, au nord de l’Écosse. Il a vécu toute sa vie dans un cinéma d’art et essai à Soho, il recommence tout à zéro. Dans ce petit parc de caravanes, il rencontre Constance, une bricoleuse de génie au manteau de loup dont il tombe amoureux, et sa fille Stella, ex-petit garçon, en pleine tempête hormonale, qui devient son amie. Autour d’eux gravitent quelques marginaux, un taxidermiste réac, un couple de satanistes, une star du porno.

Les températures plongent, les journaux télévisés annoncent des catastrophes terribles, mais dans les caravanes au pied des montagnes, on résiste : on construit des poêles, on boit du gin artisanal, on démêle une histoire de famille, on tente de s’aimer dans une lumière de miracle.

Dans ce roman éblouissant au lyrisme radical, peuplé de personnages étranges et beaux, Jenni Fagan distille une tendresse absolue qui donne envie de hâter la fin du monde.

 Jenni FAGAN est née en Écosse en 1977. Elle étudie l’écriture créative à l’université de Greenwich, puis remporte une bourse pour la Royal Holloway de Londres. Elle a publié plusieurs livres de poésie, dont le dernier, The Dead Queen of Bohemia, se trouve parmi les Best Scottish Poems 2017.  En 2013, elle figure sur la liste des jeunes écrivains britanniques les plus prometteurs publiée par Granta. Elle travaille comme écrivain en résidence dans des unités de néonatologie, des prisons pour femmes, avec des aveugles, des jeunes délinquants, des femmes en danger, et à l’université d’Édimbourg. En 2016, le Sunday Herald Culture Awards la couronne écrivain de l’année.  

Ce que j'en ai pensé :

2020, c'est demain ! Et la météo n'est pas optimiste, il va faire de plus en plus froid, geler à -56°C en Ecosse, neiger abondamment sur le Maroc et l'humanité toute entière risque bien de devoir rester confinée là où il fait chaud et où il y a à encore quelque chose à manger.

Pour Dylan, ça devait être une pause. Il n'a pas d'autre intention que semer au vent les cendres de sa mère et de sa grand-mère quand il débarque aux pieds des montagnes de Clachan Fells dans un camping où il rencontre Constance, restauratrice de meubles, survivaliste, et Cael-Stella, sa "fille", née garçon qui n'a comme obsession que son hermaphrodisme...

Loin d'un roman pré-apocalyptique (bien que le décor, les conditions s'y prêtent), cet extraordinaire bouquin plonge dans la psyché d'un trio prêt à vaciller, parle d'amour et d'espoir, de tolérance et se singularise par une narration quasi lyrique qui donne à l'ensemble toute sa force et sa poésie. Ce sont les liens humains qui importent ici et la dystopie donne un peu plus de perspective à l'intrigue. La nature est féroce mais Jenni Fagan instille de la magie dans cette catastrophe environnementale, enveloppe le lecteur dans un cocon de neige féérique.

On voudrait être là, avec eux, sur le toit de la caravane, à regarder les aurores boréales, s'enthousiasmer de la beauté d'un monde qui se dérègle, garder toute cette chaleur humaine et toute cette belle lumière que diffusent les 300 pages qui se déroulent comme un rêve.

Enorme coup de cœur ! Je risque d'avoir longtemps en tête ces personnages singuliers ! 

Merci aux Editions Métailié et à Babelio pour cette lecture incroyable !


Notre vie dans les forêts - Marie DARIEUSSECQ



Editions P.O.L
Parution : 17 août 2017
192 pages

Ce qu'en dit l'éditeur :

« Il faut que je raconte cette histoire. Il faut que j’essaie de comprendre en mettant les choses bout à bout. En rameutant les morceaux. Parce que ça ne va pas. C’est pas bon, là, tout ça. Pas bon du tout. »

[...]

Cette dystopie, qui se situe dans la postérité de Le meilleur des mondes, comme dans celle de 1984 ou de Fahrenheit 451, nous raconte une histoire de trafic d’organes, de gérontocratie, de totalitarisme sanitaire et politique.  Marie Darrieussecq, avec ce personnage très légèrement en retard sur les événements, et à ce titre bouleversant, renoue avec la veine de Truismes.

Ce que j'en ai pensé :

Imaginez un futur pas si lointain où les hommes ont un boîtier de contrôle implanté dans le cerveau, des puces anti-douleur et anti-émotions  sous la peau, où des robots contrôlent des cliniques géantes dans lesquelles des clones d'humains attendent, endormis, le moment où leur double humain aura besoin d'un organe neuf, un monde où les appartements n'ont pas de fenêtres et les "chiens" pas le besoin de courir, où les oiseaux ne chantent plus (à part les mammouths dans les zoos et les baleines en aquarium géant, reste-t-il des animaux ?) et où les forêts ne sont plus qu'organisées et fourragères ?

Imaginez un instant qu'un élément perturbateur, un VRAI humain, vous révèle la vérité ?

Je ne suis pas fan des dystopies. A priori, puisque je le reconnais, je n'en ai lu que très peu ! J'ai donc entamé ce roman avec quelques réticences et a fortiori déroutée par le style de l'auteur (comme je ne suis pas à un aveu près, je n'avais jamais lu Marie Darrieussecq non plus !).

Pourtant...

J'ai aimé ce roman, dévoré d'une traite, happée par l"histoire, à mi-chemin entre l'effroi et la fascination (parce que ces traficotages humains sur fond de clonage et de nihilisme de la pensée individuelle nous pend au nez dans un futur sûrement proche !).

Je me suis laissée emporter par les élucubrations de Viviane, l’héroïne, cette étrange manière de retracer son autobiographie qu'elle griffonne sur un cahier, ses relations avec son clone Marie, avec "le cliqueur" son patient (elle est psy), avec le monde qui l'entoure.

J'ai été surprise par cette fin non attendue, la révélation ultime qui donne à ce court roman toute sa dimension et qui fait froid dans le dos...