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La piste du vieil homme - Antonin VARENNE

 

 

Edition : Gallimard (collection « la noire »)

Parution : 4 avril 2024

240 pages

 

Ce qu’en dit l’éditeur :

Simon, septuagénaire, a depuis longtemps rompu avec la France et avec ses enfants. Il est installé depuis des années à Madagascar, où il a monté une petite affaire de tourisme.
Mais lorsqu’une lettre de sa fille lui apprend que son frère, Guillaume, est lui aussi à Mada et qu’il ne donne plus signe de vie depuis plusieurs mois, Simon part aussitôt à sa recherche.
Par les routes et les pistes ravagées de la Grande Île, il suit les indices laissés par son fils. Au rythme chaotique de son voyage, de rencontres en souvenirs, Simon tente de se réapproprier son histoire. Mais n’est-il pas trop tard pour réparer le lien ténu qui l’unit encore à ses enfants ?


Ce que j’en ai pensé :

Rouge la terre de Madagascar qui colle aux chaussures, rouge le sang répandu par les dealers de Tananarive. Une île de misère où la corruption et la violence abîment la carte postale tropicale. C’est là que Simon et son associé ont monté une affaire de buggys pour trimballer les touristes en mal d’exotisme et de sensations fortes.

C’est là qu’a atterri Guillaume, le fils de Simon, au fond de la brousse, là où la route est devenue piste, où les ponts ne résistent pas aux crues et où quelques bonnes âmes tentent de venir en aide à la population (une bonne sœur, un instituteur de brousse..).

Ce très bon roman d’Antonin Varenne nous embarque avec Simon à la recherche de ce fils qu’il connaît mal. Mêlant aventure et mélancolie, la quête du vieil homme est, au-delà du road-trip en terre hostile, un état des lieux de sa vie, de ses échecs et de ses espoirs.

J’ai trouvé les personnages attachants, nuancés (Simon apparaît tour à tour comme blasé et égoïste, mais aussi profondément humain et émouvant) et le périple m’a permis de découvrir une île que je ne connais pas, dans ce qu’elle peut offrir de plus beau mais aussi de plus sauvagement violant.

Encore du très bon pour cet auteur !

Okavango - Caryl FEREY

Editions GALLIMARD- Série Noire

Parution : 17 août 2023

544 pages



Ce qu'en dit l'éditeur :

Engagée avec ferveur dans la lutte anti-braconnage, la ranger Solanah Betwase a la triste habitude de côtoyer des cadavres et des corps d'animaux mutilés.
Aussi, lorsqu'un jeune homme est retrouvé mort en plein cœur de Wild Bunch, une réserve animalière à la frontière namibienne, elle sait que son enquête va lui donner du fil à retordre. D'autant que John Latham, le propriétaire de la réserve, se révèle vite être un personnage complexe. Ami ou ennemi ?
Solanah va devoir frayer avec ses doutes et une très mauvaise nouvelle : le Scorpion, le pire braconnier du continent, est de retour sur son territoire...

Premier polar au cœur des réserves africaines, Okavango est aussi un hymne à la beauté du monde sauvage et à l'urgence de le laisser vivre. 

 

Ce que j'en ai pensé : 

Premier polar de Caryl FÉREY pour moi et un sujet qui m'invite à sa lecture : l'Afrique.

Polar que j'ai lu en quelques heures mais qui m'a un peu laissée sur la touche.

L'histoire est addictive : le combat de rangers namibiens pour préserver la faune africaine sauvage en voie de disparition et très convoitée par les contrebandiers. Des gentils et des méchants au milieu de bêbêtes super dangereuses, une piqûre de rappel sur les guerres qui ont animé le sud du continent, sur les enjeux économiques (mines de diamants, trafic d'ivoire, ségrégation et racisme, colonisation..).

Pourtant, j'ai trouvé les 2 premiers tiers du polar un peu mous, pas assez "sous tension" et quelques pages peut-être inutiles parce qu'elles cassent le rythme. J'ai souri aussi au sujet des personnages, parfois à la limite de la caricature (on sait déjà qu'à la fin les méchants vont mourir, où serait la morale dans le cas contraire !!).

J'ai souvent dû relire plusieurs fois le même paragraphe avant de me faire (ou pas) au style de l'auteur, parfois haché (usage des tirets), parfois lent ou maladroit, avec des expressions "littéraires" mal appropriées qui ont ralenti ma lecture et légèrement gâché mon plaisir.

Mais, au final, c'était plutôt pas mal. A voir si je tente un des opus précédents..


Regardez-nous danser (Le pays des autres - tome 2) - Leïla SLIMANI

 

Editions GALLIMARD - Collection La Blanche

Parution : 3 février 2022

355 pages


Ce qu'en dit l'éditeur :

« Année après année, Mathilde revint à la charge. Chaque été, quand soufflait le chergui et que la chaleur, écrasante, lui portait sur les nerfs, elle lançait cette idée de piscine qui révulsait son époux. Ils ne faisaient aucun mal, ils avaient bien le droit de profiter de la vie, eux qui avaient sacrifié leurs plus belles années à la guerre puis à l’exploitation de cette ferme. Elle voulait cette piscine, elle la voulait en compensation de ses sacrifices, de sa solitude, de sa jeunesse perdue. »


1968 : à force de ténacité, Amine a fait de son domaine aride une entreprise florissante. Il appartient désormais à une nouvelle bourgeoisie qui prospère, fait la fête et croit en des lendemains heureux. Mais le Maroc indépendant peine à fonder son identité nouvelle, déchiré entre les archaïsmes et les tentations illusoires de la modernité occidentale, entre l’obsession de l’image et les plaies de la honte. C’est dans cette période trouble, entre hédonisme et répression, qu’une nouvelle génération va devoir faire des choix. "Regardez-nous danser" poursuit et enrichit une fresque familiale vibrante d’émotions, incarnée dans des figures inoubliables. 

 

Ce que j'en ai pensé :

Il est loin le temps où Mathilde, jeune alsacienne et fraîche épousée d'Amine, tirait à la carabine sur les rats depuis sa misérable bicoque marocaine. Le domaine a prospéré et c'est maintenant contre les crapauds attirés par sa toute nouvelle piscine qu'elle s'énerve.

L'ambiance est à la suspicion dans ce Maroc tout juste libéré de la colonisation, le règne d'Hassan II est violence et tensions politiques. Il ne fait pas bon étaler trop sa richesse ni affirmer d'idées libertaires.

Autour de la famille Belhadj, le monde change. Les femmes rêvent de liberté, de libre choix pour leurs vies et restent pourtant prisonnières des traditions, du qu'en-dira-t-on et des milices secrètes.

C'est un monde en révolution qu'aborde la romancière dans ce second opus de la saga familiale, un monde en équilibre, au bord du gouffre, coincé entre Maghreb traditionnel et Europe des Trente Glorieuses. Un monde où l'émancipation (tant féminine par la voix d'Aïcha que masculine par celle de Selim qui rêve d'Amérique) tarde, s'oppose au conservatisme et à la répression du régime en place, et où l'accomplissement d'une réussite sociale ne garantit pas le bonheur.

Un très bon roman, vivant, mêlant vies minuscules et Histoire malgré une narration un peu "classique". Des personnages plus prégnants, plus empathiques.

A espérer que l'on n'attende pas encore 2 ans avant le prochain opus !

Adieu poulet ! - Raf VALLET (Jean LABORDE)

 

Editions Gallimard - Collection Série Noire

Première parution en 1974

Parution : 4 novembre 2021

Préface de Gilles Magniont

272 pages


Ce qu'en dit l'éditeur :

Germain Verjeat, commissaire tête brûlée mais aussi superflic, est accusé de corruption par une proxénète. Au lieu de le défendre, sa hiérarchie décide de le sacrifier aux appétits légalistes d’un jeune juge d’instruction. Verjeat s’allie alors à un ancien truand prétendument rangé pour orchestrer sa vengeance et faire tomber ceux qui ont cherché à le trahir.

Adieu poulet ! est un classique du polar politique des années 70. Il a fait l’objet d’une adaptation cinématographique de Pierre Granier-Deferre, avec Lino Ventura et Patrick Dewaere.


Ce que j'en ai pensé :

Ça me réjouissait de lire un classique de la Série Noire, d'autant plus que l'adaptation cinéma avec Lino Ventura (acteur que j'adore !) était un gage de qualité.

Pendant les cent premières pages, j'ai failli lâcher l'affaire...Pourquoi ? Surtout à cause du style qui m'est apparu "décousu", pas très fluide..et puis aussi à cause de l'abondance de personnages qui a commencé de me perdre.

Et puis..j'ai en me calant sur le rythme, j'ai finalement apprécié le ton, les notes d'humour sarcastique et les personnages. 

Ça ne sera pas mon polar préféré de l'année, loin s'en faut, mais j'ai aimé cette plongée (parfois abyssale par rapport au monde d'aujourd'hui) où on pouvait encore se délecter d'une côte de boeuf ou d'une tête de veau ravigote sans être pointés du doigt, où le petit rouge et la bière au comptoir aidaient à digérer les mauvaises nouvelles...et où un final quelque peu rocambolesque (la fuite de Verjeat est épique) paraissait encore un peu vraisemblable.

(si ça vous dit, il y a plein d'extraits du film, avec Lino Ventura et Patrick Dewaere, sur Youtube)

Mon maître et mon vainqueur - François-Henri DÉSÉRABLE


Editions Gallimard

Parution : 19 août 2021

192 pages


Ce qu'en dit l'éditeur :

« Le cahier, c’était la première chose que m’avait montrée le juge, quand tout à l’heure j’étais entré dans son bureau. Sous la couverture souple et transparente, on pouvait lire au feutre noir : MON MAÎTRE ET MON VAINQUEUR.
Sur les pages suivantes, il y avait des poèmes. Voilà ce qu’on avait retrouvé sur Vasco : le revolver, un cahier noirci d’une vingtaine de poèmes et, plus tard, après expertise balistique, des résidus de poudre sur ses mains.
Voilà ce qu’il en restait, j’ai pensé, de son histoire d’amour. » 

 

Ce que j'en ai pensé :

Un juge, un greffier, et un témoin auditionné, le narrateur.

Une passion amoureuse, destructrice, impossible, dont il ne reste que pour preuve ce cahier, rempli de poèmes écrits par Vasco, l'ami du narrateur, amoureux de Tina.

Ce qui pourrait n'être qu'une banale histoire d'amour qui tourne au vaudeville est en réalité un enchantement littéraire ou la poésie flirte avec l'humour, où l'on croise Verlaine et Rimbaud, où l'on vole le cœur de Voltaire (et où l'on fait l'amour dans les réserves de la BnF !).

Ça ne pourrait être qu'une farce, un scénario tragi-comique, si les mots de FHD ne sonnaient si juste, comme si l'auteur ne nous faisait pas une si brillante démonstration littéraire qu'il a tout compris de l'amour et de la vie. Un roman à la fois profond, sur la passion amoureuse (Roméo et Juliette n'ont qu'à bien se tenir !) et sur l'amitié, et tout aussi léger, presque frétillant.

Une régalade, un beau clin d'oeil à Tanguy Viel (tant pour son juge dans Article 353 du Code Pénal que pour son sens de la chute et des situations extravagantes).

Belle réussite !

(si bien, qu'à la librairie quelques jours plus tard après cette lecture, je l'ai à nouveau regardé sur son rayonnage en me disant que j'aimerais ne pas encore l'avoir lu..)

Mohican - Eric FOTTORINO

 

Editions Gallimard – Collection La blanche

Parution : 19 aout 2021

188 pages

  

Ce qu'en dit l'éditeur :

Brun va mourir.

Il laissera bientôt ses terres à son fils Mo.

Mais avant de disparaître, pour éviter la faillite et gommer son image de pollueur, il décide de couvrir ses champs de gigantesques éoliennes.

Mo, lui, aime la lenteur des jours, la quiétude des herbages, les horizons préservés. Quand le chantier démarre, un déluge de ferraille et de béton s’abat sur sa ferme. Mo ne supporte pas cette invasion qui défigure les paysages et bouleverse les équilibres entre les hommes, les bêtes et la nature.

Dans un Jura rude et majestueux se noue le destin d’une longue lignée de paysans.

Aux illusions de la modernité, Mo oppose sa quête d’enracinement. Et l’espoir d’un avenir à visage humain.

 

 Ce que j'en ai pensé :

Quatre parties, « Déluge », « Désert », « Destruction » et « Délivrance », quatre étapes pour cette famille entre espoir et désespoir..

Sans concessions, Eric Fottorino pose un constat : l'agriculture a changé, pour le pire et pour ...le pire ! Il dresse, au travers de la vie d'une famille de paysans jurassiens, un état des lieux bouleversant. La longue maladie du patriarche, Brun, sert d'accessoire à la recension d'une longue série de choix qui mène une famille à sa perte, un fils à la barre du tribunal.

Quand choisir de ne plus être un « agricultUeur » , renoncer au tout chimique (engrais, pesticides) pour se tourner vers les énergies d'avenir (quelques tonnes de béton pour implanter des éoliennes qui décapiteront les oiseaux et feront mourir les troupeaux) n'est peut-être pas la meilleure solution..

De combats non compris en combats perdus.

Que transmettre alors de ces terres cultivées ? De la sueur des hommes et de la fraîcheur de la rosée ? Que dire des renoncements, des rancunes, de la sensation d'appartenir à une terre ?

Dans une narration assez classique, mais ô combien juste et souvent poétique, l'auteur nous embarque dans un paysage (plus que dans une histoire), ose l’ambiguïté de la réflexion sur les choix « offerts » (et les guillemets le sont à dessein) aux agriculteurs, aux « nourrisseurs » des hommes…

Ce roman m'a beaucoup touchée parce qu'au-delà de l'histoire évoquée, on peut toucher du doigt la fragilité de notre monde qui cherche à s'adapter.

Rien ne t'appartient - Nathacha APPANAH

 

Editions Gallimard - Collection La blanche

Parution : 19 août 2021

160 pages



Ce qu'en dit l'éditeur :

« Elle ne se contente plus d’habiter mes rêves, cette fille. Elle pousse en moi, contre mes flancs, elle veut sortir et je sens que, bientôt, je n’aurai plus la force de la retenir tant elle me hante, tant elle est puissante. C’est elle qui envoie le garçon, c’est elle qui me fait oublier les mots, les événements, c’est elle qui me fait danser nue. »


Il n’y a pas que le chagrin et la solitude qui viennent tourmenter Tara depuis la mort de son mari. En elle, quelque chose se lève et gronde comme une vague. C’est la résurgence d’une histoire qu’elle croyait étouffée, c’est la réapparition de celle qu’elle avait été, avant. Une fille avec un autre prénom, qui aimait rire et danser, qui croyait en l’éternelle enfance jusqu’à ce qu’elle soit rattrapée par les démons de son pays.

À travers le destin de Tara, Nathacha Appanah nous offre une immersion sensuelle et implacable dans un monde où il faut aller au bout de soi-même pour préserver son intégrité. 

 

Ce que j'en ai pensé :

Je suis fan de Nathacha Appanah depuis que j'avais découvert "Le dernier frère", j'attends donc chacun de ses romans avec une vive impatience, certaine d'être à nouveau charmée par les mots d'une conteuse hors pair.

Pourtant, cette fois-ci, j'ai bien cru que j'allais renoncer après quelques dizaines de pages de cette histoire à laquelle je ne comprenais pas grand chose. 

Jusqu'à ce que Vijaya, la petite fille oubliée, refoulée dans les limbes de la mémoire, perce les flancs de la narratrice, Tara, pour sortir au grand jour et raconter son destin de "fille gâchée" dans un orphelinat jusqu'à sa renaissance après le tsunami de 2004.

Et la magie a opéré, délivrant dans un roman sensible et sensuel toute la poésie que Nathacha Appanah est capable d'instiller dans les pires catastrophes, dans la violence qui assomme le lecteur, presque par surprise. 

C'est un roman sur la solitude, la douleur et la résilience, sur la construction de soi, sur le deuil et l'espoir, et sur la condition des femmes.

Un beau portrait de femme, entre chagrin et folie, servi par une plume délicate.

Fin de siècle - François GENDRON

 

Editions GALLIMARD - Collection La noire

Parution : 12 mars 2020

240 pages

Ce qu'en dit l'éditeur :

2024, Bassin méditerranéen : depuis une dizaine d'années, les ultra-riches se sont concentrés là, le seul endroit où ne sévissent pas les mégalodons, ces requins géants revenus, de façon inexplicable, du fond des âges et des océans. À Gibraltar et à Port Saïd, on a construit deux herses immenses. Depuis, le bassin est clos, sans danger. Alors que le reste du monde tente de survivre, ici, c'est luxe, calme et volupté pour une grosse poignée de privilégiés. Mais voilà ! l'entreprise publique qui gérait les herses vient d'être vendue à un fonds de pension canadien. L'entretien laisse à désirer, la grille de Gibraltar vient de céder, le carnage se profile...

Ce que j'en ai pensé :

Féroce dystopie, Fin de siècle, passe du polar à la science-fiction sans prévenir, en surfant sur le roman social.

Tout fout le camp, le climat a changé, les ultra-riches s'en sortent en se protégeant dans leurs forteresses ultra-sécurisées, mais les requins géants n'ont pas dit leur dernier mot. Au jeu capitaliste des hommes, la nature a encore beaucoup à démontrer !

Le sang gicle allègrement (RIP Albert II de Monaco !), les failles spatio-temporelles s'ouvrent au premier perdu, le monde connu vole en éclats..

Il faut lire ce rompol au 3ème degré (au moins), ne pas s'étonner de la loufoquerie ambiante et des scènes franchement barrées, il faut le prendre comme il est, une bouffée de fantaisie, de délire littéraire (et délire plutôt stylé d'ailleurs!).

Saint Jacques - Bénédicte BELPOIS

 

Éditions Gallimard

Parution : 8 avril 2021

160 pages

 

Ce qu'en dit l'éditeur :

À la mort de sa mère, Paloma hérite d’une maison abandonnée, chargée de secrets au pied des montagnes cévenoles. Tout d’abord décidée à s’en débarrasser, elle choisit sur un coup de tête de s’installer dans la vieille demeure et de la restaurer. La rencontre de Jacques, un entrepreneur de la région, son attachement naissant pour lui, réveillent chez cette femme qui n’attendait pourtant plus rien de l’existence bien des fragilités et des espoirs.


Ode à la nature et à l’amour, Saint Jacques s’inscrit dans la lignée de Suiza, le premier roman de Bénédicte Belpois, paru en 2019 aux Éditions Gallimard. Avec une simplicité et une sincérité à nulles autres pareilles, l’auteure nous offre une galerie de personnages abîmés par la vie mais terriblement touchants. 

 

Ce que j'en ai pensé :

 Bénédicte BELPOIS est-elle tombée dans la guimauve ? Quelle déception que ce second roman, tout miel, tout plein de bons sentiments et de bienveillance, alors que "Suiza" avait tant d'originalité !


Les personnages sonnent creux, sont trop peu approfondis pour qu'on s'y attache (mais sur 160 pages, pouvait-il en être autrement ?), sont à la limite de la caricature (la parisienne bouleversée par les charmes d'une maison à la campagne, l'artisan un peu rustre et bougon mais au cœur tendre, la vieille paysanne toute racornie et son fils indigne, etc...c'est du déjà vu...).


Si le roman aborde les difficultés des relations mère-fille qui se reproduit de génération en génération, comme la maternité précoce des personnages féminins de cette lignée, elles me sont apparues trop peu exploitées pour dessiner correctement la personnalité de Paloma la narratrice.


C'était donc pour moi un ratage, ça ressemble plus à un "feel-good book" (d'autant qu'évidemment, tout est bien qui finit bien !).

Un ratage pour moi même si j'ai aimé les quelques passages qui parle de la nature cévenole…

Dommage !

Les enfants sont rois - Delphine de VIGAN

 

Editions Gallimard

Parution : 4 mars 2021

352  pages



Ce qu'en dit l'éditeur :

« La première fois que Mélanie Claux et Clara Roussel se rencontrèrent, Mélanie s’étonna de l’autorité qui émanait d’une femme aussi petite et Clara remarqua les ongles de Mélanie, leur vernis rose à paillettes qui luisait dans l’obscurité. “ On dirait une enfant ”, pensa la première, “elle ressemble à une poupée”, songea la seconde.

Même dans les drames les plus terribles, les apparences ont leur mot à dire. »

À travers l’histoire de deux femmes aux destins contraires, Les enfants sont rois explore les dérives d’une époque où l’on ne vit que pour être vu. Des années Loft aux années 2030, marquées par le sacre des réseaux sociaux, Delphine de Vigan offre une plongée glaçante dans un monde où tout s’expose et se vend, jusqu’au bonheur familial. 

 

Ce que j'en ai pensé :

Tout oppose Mélanie, biberonnée à la télé-réalité et qui met en scène sa vie et ses enfants sur Instagram et YouTube, et Clara, femme-flic élevée loin de la télé, célibataire sans enfant qui va enquêter sur la disparition de Kimmy, enfant-star des réseaux sociaux fille de Mélanie.


Dans ce roman aux faux airs de polar, Delphine de Vigan ouvre la réflexion sur les rapports humains qui se métamorphosent depuis l'usage massif d'internet, sur l'impudeur de nos vies étalées sur les écrans, sur la monétisation d'images qui n'ont plus rien de privé mais aussi sur les dangers de la surexposition, sur la manipulation à des fins mercantiles..elle dessine pourtant en creux le plaisir, le besoin d'amour et de rêve.


Une lecture qui oblige à la lucidité : que partageons nous vraiment sur les réseaux ? Et d'ailleurs s'agit il seulement de "partage" ? Ne s'agit il pas guérir des blessures d'ego ?


Il y aurait encore beaucoup à en dire, beaucoup à craindre aussi (ceux qui exposent leurs enfants sur les réseaux leur laissent ils le choix ? Quid du droit à l'image ?)


Intéressante réflexion sur notre société ultraconnectée et ses dérives, ce roman se lit d'une traite !

Là d'où je viens a disparu - Guillaume POIX

 

Editions Gallimard - Collection Verticales

Parution : 3 septembre 2020

288 pages

 

Ce qu'en dit l'éditeur :

 « Ça fait deux ans que je ne l'ai pas revu. Sept cent vingt-trois jours pour être précise. Il y a un mois, j'ai reçu une lettre de lui en provenance des États-Unis. Il m'indiquait qu'il avait fui notre pays et qu'il travaillait dans une entreprise de bâtiment. Il allait bien, il écrirait de temps en temps, il me souhaitait du calme maintenant qu'on ne se reverrait plus.

J'ai brûlé la lettre et j'ai regardé mon fils aîné partir en fumée. ».

Inspiré de faits réels, ce roman choral explore des rêves d'exil, accomplis ou à jamais manqués. D'un continent à l'autre, des familles dispersées affrontent la même incertitude : que transmet-on à ses enfants qu'aucune frontière ne peut effacer ? 

 

Ce que j'en ai pensé :

 Marta la Salvadorienne dont les deux fils, Luis et Fabio, ont choisi d'émigrer aux Etats-Unis, Litzy elle-aussi salvadorienne et Zahra la somalienne toutes deux femmes de ménage dans le manoir du futur président américain, Angie la somalienne devenue Giant le temps de son voyage clandestin vers la France où vivent Pascal, sa femme Hélène et leur fils Jérémy. Galerie de douleurs et de destins qui se croisent, des destins qui basculent au fil de l'exil, galerie de vies bousculées et de choix difficiles.

Un roman intelligent qui donne la parole aux exilés, aux migrants, ceux qu'on n'entend pas, qu'on aperçoit sur de terribles photos (Luis et sa fille noyés en traversant le Rio Grande, est l'un des personnages de ce roman), une narration originale mêlant chansons, articles, tableaux et décompte, par ailleurs poétique malgré la gravité du sujet, des personnages travaillés.

Un roman touchant et qui interroge (à la manière d'Hélène qui se demande ce qu'elle pourrait faire de plus que recenser les décès des exilés pour son association, elle qui sait son fils Jérémy militant anti-migrants), un roman qui réussit à éviter l'écueil du pathos.

Le Palais des Orties - Marie NIMIER

 

 

Editions Gallimard - collection La blanche

Parution : 20/08/2020

272 pages

 

Ce qu'en dit l'éditeur :

 Quelque part en France, une campagne modeste, un peu défigurée. Au fond d’une vallée, à quelques kilomètres d’un village, des hangars recouverts de tôles mangées par la rouille, une ferme où tout serait à reconstruire. Autour, des champs d’orties.

Nora et Simon vivent là avec leurs deux enfants. Ce n’est au départ ni un choix ni un rêve. Ils gagnent leur vie avec une plante que tout le monde arrache. L’ambiance est gaie, plutôt. On se serre les coudes. On est loin du bon vieux temps, loin des exploitations à grande échelle, loin de l’agriculture bio et raisonnée. C’est la débrouille.

Et puis, un jour, arrive une jeune fille avec son sac à dos. Frederica. Fred fait du woofing. Contre le gîte et le couvert, elle offre ses bras.
Le Palais des Orties est un roman d’amour et de métamorphoses, le récit d’une passion brûlante.  

 

Ce que j'en ai pensé :

C'est Frederica qui arrive un jour trop tôt dans l'exploitation de Nora et Simon, qui va bouleverser la vie de ce couple reconverti dans l'agriculture, qui va d'abord semer la joie, puis le trouble, avant de provoquer un cataclysme au sein de la famille...

Le palais des orties, c'est l'histoire de cet amour inédit, interdit, de ces émotions féminines, des non-dits, des sentiments qui oscillent entre tendresse et violence.

Je n'avais pas lu Marie Nimier depuis "La girafe", mais ce roman m'a charmée. J'en ai aimé la langue, le style, les personnages (ceux en arrière-plan ne sont pas négligés !). J'ai aimé aussi la délicatesse de l'auteur, son intelligence à nous donner à lire cette histoire sans préjugés, sans abrupts, sa manière d'instiller la tension, de nouer l'intrigue dans une atmosphère qui aurait pu être plus lourde..

J'ai donc, vous l'avez deviné, beaucoup aimé ! Et je remercie Babelio et les Editions Gallimard pour leur confiance.

 

Bilan de Mai 2020

Bien, bien...

Je suis bien embêtée : l'envie de rédiger des billets de lecture ne revient pas. Ça se complique.

Mais, notez que je fais l'effort (sic), avec presque 10 jours de retard, de venir poser un bilan mensuel.



Douze livres, romans et essais, aucun polar ce mois-ci !

Il y a eu du très bon, du pas mal mais aussi une déception.


J'ai adoré :


* Tant qu'il y aura des cèdres, Pierre JARAWAN, Editions Héloïse d'Ormesson

Un excellent roman que je recommande (et que je relirai !).


J'ai beaucoup aimé :


* Nouvel an, Juli ZEH, Editions Actes Sud

Parce que Lanzarote et un secret de famille.


* Dehors, la tempête, Clémentine MELOIS, Grasset

Un essai sur la littérature, le langage, les mots, toujours un peu décalé !


* Loin, Alexis MICHALIK, Editions Albin Michel

Même si la première partie m'a un peu agacée !


* Giono, furioso, Emmanuelle LAMBERT, Editions Stock

Un point de vue intéressant et quelques "mythes" revus sur cet auteur...


* De la forêt, Bibhouti Bhoushan BANERJI, Editions Zulma

Une ré-édition d'un roman indien qui offre un beau regard sur l'écologie.


* Un automne de Flaubert, Alexandre POSTEL, Editions Gallimard

Savoureux, instantané instructif !


* Que sont nos amis devenus ? Antoine SENANQUE, Grasset

Lecture sympa, personnage attachant.


J'ai moins aimé :


* Hugo Pratt, trait pour trait, Thierry THOMAS, Editions Grasset

Ça manquait de peps, selon moi...


* Comme des frères, Claudine DESMARTEAU, Editions Iconoclaste

La fin m'a paru manquer de saveur !


* Petit traité de philosophie naturelle, Kathleen DEAN MOORE, Editions Gallmeister

Quelques "nouvelles" m'ont plu, mais je me suis lassée...


La déception :


* Les méduses, Frédérique CLEMENÇON, Editions Flammarion

Je suis passée à côté de ce roman, sans m'en expliquer la raison.


***

Et de votre côté, ça a donné quoi ?


Le pays des autres - Leïla SLIMANI

Editions Gallimard - Collection La blanche
Parution : 5 mars 2020
368 pages


Ce qu'en dit l'éditeur :

En 1944, Mathilde, une jeune Alsacienne, s’éprend d’Amine Belhaj, un Marocain combattant dans l’armée française. Après la Libération, le couple s’installe au Maroc à Meknès, ville de garnison et de colons. Tandis qu’Amine tente de mettre en valeur un domaine constitué de terres rocailleuses et ingrates, Mathilde se sent vite étouffée par le climat rigoriste du Maroc. Seule et isolée à la ferme avec ses deux enfants, elle souffre de la méfiance qu’elle inspire en tant qu’étrangère et du manque d’argent. Le travail acharné du couple portera-t-il ses fruits? Les dix années que couvre le roman sont aussi celles d’une montée inéluctable des tensions et des violences qui aboutiront en 1956 à l’indépendance de l’ancien protectorat. 
 
Tous les personnages de ce roman vivent dans «le pays des autres» : les colons comme les indigènes, les soldats comme les paysans ou les exilés. Les femmes, surtout, vivent dans le pays des hommes et doivent sans cesse lutter pour leur émancipation. Après deux romans au style clinique et acéré, Leïla Slimani, dans cette grande fresque, fait revivre une époque et ses acteurs avec humanité, justesse, et un sens très subtil de la narration. 

Ce que j'en ai pensé :

Changement de style pour Leïla Slimani, pour mon plus grand plaisir !

Voila une trilogie qui débute aux abords de Meknès, au Maroc, une grande fresque familiale aux personnages multiples qui accroche le lecteur dès les premières pages.

Les personnages justement ! 
J'ai aimé qu'ils soient si finement campés, chacun fait face à ses propres démons, à ses contradictions, aucun n'est noir ni blanc. Tous sont dessinés en finesse, révèlent des caractères intéressants, donnent la mesure de l'intrigue et sont les témoins des grands bouleversements qui vont secouer le pays à la veille de son indépendance.

C'est un roman qui parle de la place des femmes dans la société marocaine, leur volonté d'émancipation et leur soumission entremêlées, qui explore le thème de "l'autre" comme étranger, y compris dans son propre pays, et qui restitue un instantané saisissant du Maroc dans les années 1950 entre tradition et modernité.

Vivement la suite !

Encre sympathique - Patrick MODIANO


Editions Gallimard - Collection La Blanche
parution : 3 octobre 2019
144 pages


Ce qu'en dit l'éditeur :

«Et parmi toutes ces pages blanches et vides, je ne pouvais détacher les yeux de la phrase qui chaque fois me surprenait quand je feuilletais l’agenda : "Si j’avais su…" On aurait dit une voix qui rompait le silence, quelqu’un qui aurait voulu vous faire une confidence, mais y avait renoncé ou n’en avait pas eu le temps.»

Ce que j'en ai pensé :

Retrouver Modiano, c'est accepter de replonger dans les brumes du temps, à la recherche de personnes perdues de vue depuis longtemps et dont on n'est même pas sûr qu'elles aient existé, si tant est que leur nom soit leur véritable identité.

C'est naviguer en somnambule dans un Paris qui n'existe plus, dans un temps révolu où les numéros de téléphone ne comportaient pas encore 10 chiffres, à une époque avant les 30 glorieuses où des passés parfois honteux s'effacent et où des avenirs pleins de promesses se dessinent. La fin d'un monde, le début d'une nouvelle ère, où chaque fois le narrateur s'égare, se raccroche à des bribes de souvenirs, des réminiscences..

L'OBS qualifie Modiano de "maître des horloges", c'est presque définir l'auteur, ses sursauts vers le passé, son écriture parfois elliptique (qu'on ne peut manquer d'associer à ses interventions filmées, bredouillantes, hésitantes, comme à la recherche du mot juste qui donnera son sens à sa pensée).

L'encre sympathique, c'est celle qui écrit les messages secrets, celle qui donne encore à voir, roman après roman, l'auteur, dans sa complexité (puisqu'il évoque ici plusieurs fois 'acte d'écriture), et peut-être dans ses complexes.

Un excellent opus ! J'ai beaucoup aimé !!


Extrait :

"Je crois qu'il est préférable de laisser courir sa plume. Oui, les souvenirs viennent au fil de la plume. Il ne faut pas les forcer, mais écrire en évitant le plus possible les ratures. Et dans le flot ininterrompu des mots et des phrases, quelques détails oubliés ou que vous avez enfouis, on ne sait pourquoi,au fond de votre mémoire remonteront peu à peu à la surface. Surtout ne pas s'interrompre, mais garder l'image d'un skieur qui glisse pour l'éternité sur une piste assez raide, comme le stylo sur une page blanche. Elles viendront après les ratures."

Le ciel par-dessus le toit - Nathacha APPANAH


Editions Gallimard
Parution : 22 août 2019
128 pages



Ce qu'en dit l'éditeur :


«Sa mère et sa sœur savent que Loup dort en prison, même si le mot juste c’est maison d’arrêt mais qu’est-ce que ça peut faire les mots justes quand il y a des barreaux aux fenêtres, une porte en métal avec œilleton et toutes ces choses qui ne se trouvent qu’entre les murs.

Elles imaginent ce que c’est que de dormir en taule à dix-sept ans mais personne, vraiment, ne peut imaginer les soirs dans ces endroits-là.»

Comme dans le poème de Verlaine auquel le titre fait référence, ce roman griffé de tant d’éclats de noirceur nous transporte pourtant par la grâce de l’écriture de Nathacha Appanah vers une lumière tombée d’un ciel si bleu, si calme, vers cette éternelle douceur qui lie une famille au-delà des drames. 

Ce que j'en ai pensé :

128 pages seulement pour retrouver la plume ô combien poétique de Nathacha APPANAH ! C'est un peu court ! 

et pourtant, ça condense des instantanés de vie, de drames, d'amour et de désamours, de fuites et de renoncements.

Eliette-Phénix, petite fille parfaite modelée à l'image de ce que ses parents souhaitent, jusqu'à ce baiser qui la fait basculer, jusqu'à ses enfants qu'elle aime mais avec lesquels elle marque une distance, comme si l'amour présentait un danger, jusqu'à Paloma sa fille qui prend le large et Loup, l'enfant-bizarre, délinquant, qui fuit le monde en courant comme un forcené. 

Une famille étrange, un peu dysfonctionnelle, des ratés et des incompréhensions, des non-dits qui polluent l'amour, la relation mère-enfant...

Il y aurait de quoi programmer la psychanalyse de ces 3 personnages tant leur psyché est complexe, troublée. 
Mais Nathacha APPANAH nous livre Phénix-Paloma-Loup dans leur côté brut, réussit à instiller de la poésie, de la douceur, et invite à la réflexion : sommes-nous le miroir de nos parents (et de notre enfance) ou son exact contraire ?

Court, étonnant, et BON !

Le ciel est, par-dessus le toit,
Si bleu, si calme !
Un arbre, par-dessus le toit,
Berce sa palme.

                                              Paul VERLAINE

Court vêtue - Marie GAUTHIER

Editions Gallimard
Parution 1er décembre 2018
112 pages
Goncourt du Premier Roman


Ce qu'en dit l'éditeur :

«Vive, légère, alerte, elle était comme un courant d’air dans la maison. Elle arrivait pour repartir une seconde plus tard. La nuit, elle filait sans prévenir. Puis soudain elle était dans sa chambre, dans son lit. Félix l’entendait respirer dans son sommeil. Il imaginait sa
poitrine en train de se gonfler sous la chemise de nuit. Il faisait jour c’était dimanche.» 

Félix, quatorze ans, en apprentissage dans un bourg poussiéreux et écrasé de chaleur, est hébergé par son patron. Dans la maison du cantonnier habite aussi sa fille de seize ans Gilberte, dite Gil. Gil travaille à la supérette, s’occupe avec une certaine légèreté des repas et du ménage. Dans le temps qui lui reste, elle s’éclipse avec des hommes. Beaucoup d’hommes, souvent plus âgés qu’elle. Fasciné par la jeune fille, Félix vit dans l’attente d’un regard de Gil, d’un signe. 

Marie Gauthier restitue avec une intensité magnétique l’atmosphère moite et oppressante du bourg en plein été, les sensations confuses du jeune garçon devant la sensualité troublante du corps de Gil. 

Ce que j'en ai pensé :

C'est un été torride, étouffant, écrasé de chaleur et sans beaucoup de perspectives pour Félix qui se retrouve placé chez le cantonnier d'un bourg pour apprendre un métier. C'est un garçon encore mal dégrossi, ni trop bête ni trop malin, à qui on donne comme compagnons "le père au mégot" (le cantonnier, un peu paresseux, un peu porté sur l'apéro) et sa fille, Gil (pour Gilberte) qui, de son fard à paupières à ses jupes légères, va tournebouler les sens du gamin.
Gil qui fait l'amour, tout le temps, avec tous ceux qui passent, juste pour voir, pour comparer, et qui bientôt s'émeut de ce garçon dont elle perçoit le trouble et la sincérité des émotions. 

Un peu plus d'une centaine de pages pour un roman qui emprunte tant à Marivaux qu'à Japrisot (L'été meurtrier), qui explose de chaleur et de sensualité, en phrases courtes, en phrases qui suggèrent plus qu'elles ne disent... Il y a là l'émoi des premières amours, les corps qui s'évitent ou s'emmêlent, et une réflexion sur la sexualité (celle tendre et embarrassée de Félix, celle libérée, légère de Gil).

J'aime beaucoup les premiers romans, riches de promesses futures. Souvent le Goncourt du Premier Roman révèle des pépites d'auteurs à suivre absolument.
Ce roman-là ne déroge pas à la règle ! 

Dernier arrêt avant l'automne - René FRÉGNI


Editions Gallimard - Collection La Blanche
Parution : 16 mai 2019
176 pages


Ce qu'en dit l'éditeur :

Le narrateur, écrivain, a trouvé un travail idéal dans un village de Provence : gardien d’un monastère inhabité, niché dans les collines. Il s’y installe avec pour seule compagnie un petit chat nommé Solex. Un soir, en débroussaillant l’ancien cimetière des moines, il déterre une jambe humaine fraîchement inhumée. Mais quand il revient avec les gendarmes, la jambe a disparu… Qui a été tué? Et par qui? 

L’enquête mènera, par des chemins détournés, à des vérités inattendues. Entre-temps, nous aurons traversé les paysages de l’arrière-pays provençal, peints avec sensualité par René Frégni. Sa langue forte et lumineuse communique son émerveillement face à toutes les formes de vie et de plaisir. L’intrigue policière souligne l’âpreté de ces forêts et vallons sauvages et donne tout son rythme au récit, jusqu’au dénouement. 


Ce que j'en ai pensé :

Ce qu'il a de bien avec René Frégni, c'est le plaisir de retrouver sa plume, poétique, intense, et sensuelle.

Cette fois, il ne parlera pas des fesses d'Isabelle mais du fabuleux et lumineux sourire d'Aline, libraire. Mais il est surtout question  des couleurs-odeurs-saveurs de la Provence, d'un printemps à l'autre, et d'une jambe de cadavre déterrée par hasard et par erreur (et sitôt disparue) dans le jardin du monastère où le narrateur vit une retraite forcée mais heureuse.

Il est question d'un couple de libraires (qui existent vraiment !), d'un bébé chat un peu collant, de solitude et de page blanche, et de la Belle Provence dans le chant des cigales.

J'ai beaucoup aimé le style (mais je suis fan depuis longtemps de René Frégni, donc vous n'êtes pas étonnés !), l'humour sous-jacent (les potes libraires ont dû trouvé l'intrigue cocasse!!) et l'habituelle poésie de la narration !

Je me disais même que, si je n'ai pas de roman à écrire (quoi que...), même si je n'ai pas besoin de m'isoler du monde (quoi que...), que je n'aimerais pas trouver la jambe d'un cadavre dans mon jardin (quoi que ...! Ça va pas la tête??!!), je me ferais bien une petite retraite, pas forcément très spirituelle (mais je ne le suis pas !) dans un vieux monastère perdu au milieu de nulle part ! Du moment que je partagerais un ballon de rouge avec René Frégni !!!

La vie en Rose - Marin LEDUN

Editions Gallimard - Collection Série Noire
Parution : 2 mai 2019
320 pages


Ce qu'en dit l'éditeur :

Ses parents partis parcourir la Polynésie, Rose - qui s'est installée avec le lieutenant Personne - se retrouve seule pour s'occuper de ses frères et soeurs. Coup sur coup, elle est confrontée au cambriolage de Popul'Hair - le salon de coiffure où elle fait la lecture -, à la découverte inopinée de sa grossesse et au meurtre de l'ex-petit ami de sa soeur. Bientôt, c'est le meilleur ami de Camille que Rose découvre poignardé. 
Entre deux nausées, deux crises existentielles et en marge de l'enquête parallèle qu'elle mène, Rose doit encore s'occuper du suivi scolaire de sa soeur, des peines de cœur de son frère aîné, des plaintes du directeur de l'hôpital où travaille Antoine qui organise des strip-pokers au service gériatrie, de lire Sacher-Masoch aux clientes de Vanessa...
Pendant ce temps, l'assassin continue de s'en prendre aux jeunes gens du lycée où Camille est scolarisée. Un matin, alors qu'elle est censée préparer chez une amie une marche de soutien à la dernière victime, Camille disparaît. 

Ce que j'en ai pensé :

Retour en fanfare de la famille Mabille-Pons ! Après « Salut à toi, ô mon frère », le premier opus, voilà un polar que je ne comptais pas louper !
 
Toujours le même ton jubilatoire, les mêmes personnages un rien déjantés (Palme d’Or à Rose, agrégée de lettres fan de hard-rock qui découvre qu’elle est enceinte de son petit ami flic), et si l’intrigue est assez prévisible, elle apporte toutefois son lot de rebondissements bienvenus et pose un regard assez caustique sur la société !

C’est frais, c’est jouissif, les dialogues sont travaillés au scalpel, bourrés d’humour, les références musicales et littéraires nombreuses (et le décalage entre les unes et les autres ajoutent du piquant – essayez de lire Ovide en écoutant les Guns !!), bref une lecture qui donne de belles couleurs au polar !

C’est chouette de voir que Marin Ledun réussit haut la main à donner du corps à cette série dont il me tarde à présent de lire la suite !