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Animal - Sandrine COLLETTE

Editions Denoël - collection Sueurs froides
Parution : 7 mars 2019
288 pages


Ce qu'en dit l'éditeur :

Dans l’obscurité dense de la forêt népalaise, Mara découvre deux très jeunes enfants ligotés à un arbre. Elle sait qu’elle ne devrait pas s’en mêler. Pourtant, elle les délivre, et fuit avec eux vers la grande ville où ils pourront se cacher. 

Vingt ans plus tard, dans une autre forêt, au milieu des volcans du Kamtchatka, débarque un groupe de chasseurs. Parmi eux, Lior, une Française. Comment cette jeune femme peut-elle être aussi exaltée par la chasse, voilà un mystère que son mari, qui l’adore, n’a jamais résolu. Quand elle chasse, le regard de Lior tourne à l’étrange, son pas devient souple. Elle semble partie prenante de la nature, douée d’un flair affûté, dangereuse. Elle a quelque chose d’animal. 
 
Cette fois, guidés par un vieil homme à la parole rare, Lior et les autres sont lancés sur les traces d’un ours. Un ours qui les a repérés, bien sûr. Et qui va entraîner Lior bien au-delà de ses limites, la forçant à affronter enfin la vérité sur elle-même.


Ce que j'en ai pensé :

7ème roman de Sandrine Collette que j'ai bien du mal à classer dans la catégorie "polar"...Pas tout à fait aussi sombre que les précédents, mais largement aussi fascinant ! 

Difficile d'en parler sans trop dévoiler l'intrigue : on passe d'une forêt népalaise aux montagnes du Kamtchatka (extrême-orient russe) sans faire tout d'abord le lien entre ces deux décors si ce n'est une nature omniprésente, dangereuse, peuplée d'animaux sauvages.

Pourtant, de l'homme qui le chasse, ou de sa proie qui attaque ou riposte, on se finit par se demander lequel a la plus grande part d'animalité en lui.
Le chasseur qui veut faire un carton et rapporter des trophées ou l'ours (j'avoue une sympathie pour ce vrai personnage dans le roman !) et le tigre qui luttent pour leurs survies ?

Sandrine Collette utilise encore sa plume de façon admirable, nous entraînant dans un flot d'émotions, restituant à la perfection l'atmosphère oppressante d'un duel homme/ourssans merci mais aussi le décor miséreux d'un bidonville népalais, passant d'un paysage à l'autre avec des mots justes, rendant à ses personnages toute leur épaisseur.

Une prouesse !


Une année de romans


C'est l'heure des bilans ! 

Je n'ai pas pu résisté à reprendre le questionnaire vu chez Jérôme , chez The Autist Reading et chez Hop sous la couette pour balayer mon année en livres !

J'ai clairement moins lu qu'en 2018 (140 livres en 2018 contre 170 en 2017) et j'ai eu aussi beaucoup moins de coups de cœur (trop d'attentes déçues)..

140 livres et 346 600 pages environ !

Moitié romans (67 dont 19 premiers romans), moitié polars (65, l'ambiance n'est donc pas si noire !), et quelques récits et documents.

Seulement 47 romans écrits en langue française parmi mes lectures qui pourtant m'ont emmenée au bout du monde (26 livres se déroulent sur le continent américain, 10 en Afrique - au sens large-, 11 ailleurs en Europe et 7 dans les pays nordiques).


1) Ma 1ère lecture de l'année ?
(et une très bonne surprise !)

Community - Estelle NOLLET - Editions Albin Michel

 2) Le livre le plus bref que j'ai lu ?
(96 pages avec beaucoup d'humour) 
 
 Bambi bar - Yves RAVEY - Editions de Minuit

3) Le livre le plus dépaysant ?
(et qui aurait mérité plus de visibilité)

Un océan, deux mers, trois continents - Wilfried N'SONDÉ - Editions Actes Sud

 4) La plus belle couv' de l’année ?
(et aussi un très beau conte)

Salina, les trois exils - Laurent GAUDÉ - Editions Actes Sud

 5) Un nouvel auteur découvert cette année ?  
(et une très jolie surprise !)

La vraie vie - Adeline DIEUDONNÉ - Editions de l'iconoclaste

 6) Le livre dont l’écriture m’a éblouie ?
(étonnant !)

Frère d'âme - David DIOP - Editions du Seuil

 7) Le meilleur personnage de l’année ?
(sacrée nana !!)

Alex- Pierre LEMAITRE - Editions Le livre de poche


 8) Le livre que j’attendais le plus ?
(et qui a répondu à mes attentes !)

Juste après la vague - Sandrine COLLETTE - Editions Denoël


 9) Le livre le plus déstabilisant ?
 (pour tout un tas de raisons !)

Est-ce ainsi que les hommes jugent ? - Mathieu MÉNEGAUX - Editions Grasset

 10) Le livre le plus inattendu ?
(parce que je n'aurais pas pensé relire ce classique plein de fantaisie, et que j'en suis ravie !)

Mon chien Stupide - John FANTE - Editions 10/18

 11) Le livre que j’ai enfin lu ?
(pour lire sa suite aussitôt après !) 
 
Au revoir là-haut - Pierre LEMAITRE - Editions Albin Michel

 12) Mon plus gros pavé ?
(et ce sont deux polars !)

en poche :
Lontano - Jean-Christophe GRANGÉ - Editions du Livre de Poche (non chroniqué) - 960 pages

en broché grand format :
Signe de vie  - José RODRIGUES DOS SANTOS - Editions Harper Collins - 704 pages

 13) Le livre le plus émouvant ?
 (je n'ai pas lu grand chose qui m'ait vraiment émue cette année...)

Le paradoxe d'Anderson - Pascal MANOUKIAN - Editions du Seuil

 14) Le livre le plus drôle ? 
(et qui fait réfléchir tout de même !)

Ecoute - Boris RAZON - Editions Stock

15) Le livre qui m’a appris quelque chose que j’ignorais totalement ?
(sur l'origine de la danse de St Guy)

Entrez dans la danse - Jean TEULÉ - Editions Julliard

 16) Ma dernière lecture de l’année ?
(et un auteur que je ne pensais pas lire un jour !)

L'empire des loups - Jean-Christophe GRANGÉ - Editions Le livre de poche 
(non chroniqué) 

 17) Le plus beau titre de l’année ?
(parce que, ce poème d'Aragon, chanté par Bernard Lavilliers :
" C'était un temps déraisonnable
On avait mis les morts à table
On faisait des châteaux de sable
On prenait les loups pour des chiens
Tout changeait de pôle et d'épaule
La pièce était-elle ou non drôle
Moi si j'y tenais mal mon rôle
C'était de n'y comprendre rien"
)

Prendre des loups pour des chiens - Hervé Le Corre - Editions Rivages


 18) Le meilleur recueil de nouvelles de l’année ?
(parce que c'est surtout le seul lu en 2018 - et qu'il est super bien !)

J'aurais voulu être égyptien - Alaa EL ASWANY - Editions Actes Sud

 19) Le livre le plus ennuyeux de l’année ?
 (aurait pu postuler dans la rubrique suivante !)

Le cœur converti - Stefan HERTMANS - Editions Gallimard

 20) Le plus gros raté de l’année ?
 (lu dans le cadre du Prix Elle, la daube ultime en matière de polar !)

Défaillances - B.-A. PARIS - Editions Hugo Thriller


 21) Le meilleur livre de l’année ?
(parce que Khadra, parce que ça dérange nos préconçus) 

Khalil - Yasmina KHADRA - Editions Julliard

-**-
Et vous ? Votre bilan ?
(clic sur les titres pour lire les chroniques)

Mère toxique - Alexandra BURT

Editions Denoël - Collection Sueurs froides
Parution : 3 mai 2018
Titre original : The good daughter
Traduction : Perrine Chambon
464 pages


Ce qu'en dit l'éditeur :


De son enfance, Dahlia se souvient surtout de nuits dans des hôtels miteux et d’un quotidien chaotique à sillonner les routes du pays, au côté d’une mère complètement déjantée.

Devenue adulte, Dahlia cherche désespérément à prendre le contre-pied de cette vie, mais son enfance clandestine et le mystère qui entoure sa naissance l’empêchent d’aller de l’avant.
La jeune femme décide de se rendre auprès de sa mère à Aurora, petite ville poisseuse au beau milieu du Texas. Elle plonge alors dans le passé d’une femme au bord de la folie.
Après une découverte macabre dans une ferme voisine, Dahlia comprend que certains secrets devraient rester enterrés à tout jamais… 

Ce que j'en ai pensé :

Trois femmes se partagent la narration dans ce thriller plutôt réussi (même si, encore, je n'ai pas tardé à lever le mystère !).
Memphis et sa fille Dahlia, toujours en fuite, d'un point à l'autre des USA, et Aella la sorcière. S'entrecroisent d'autres destins féminins, ceux de Quinn qui vit à Creel Hollow Farm avec son mari Nolan, et de Taïn la gitane psychiquement très en retard, et enfin Jane Doe la fille retrouvée enterrée vivante dans le bois.

Les hommes font pâle figure et n'ont pas le beau rôle : ce sont les violeurs qui ont saccagé lle corps de Quinn, ou Nolan le mari inconsistant qui épingles des insectes dans des boîtes et séduit Taïn, ou encore Bordeaux le propriétaire du motel...

Pas de suspense insoutenable, on voit rapidement se dessiner les intrigues mêlées qui vont faire avancer la narration, mais l'atmosphère est suffisamment travaillée pour que le malaise se distille : que cache Memphis sous sa folie ordinaire ? Dahlia est-elle vraiment schizophrène ou ses flashs sont-ils des réminiscences ? 


C'est un polar habile, quoique l'intrigue soit presque convenue, mais je l'ai lu avec plaisir, sans doute pour l'ambiance, la quête d'identité sous-jacente, son côté malsain distillé page après page.

L'essence du mal - Luca D'ANDREA

Editions Denoël - Collection Sueurs froides
Parution : 26 octobre 2017
Titre original : La sostanza del male
Traduction : Anaïs Bouteille-Bokobza
464 pages


Ce qu'en dit l'éditeur :

En 1985, dans les montagnes hostiles du Tyrol du Sud, trois jeunes gens sont retrouvés morts dans la forêt de Bletterbach. Ils ont été littéralement broyés pendant une tempête, leurs corps tellement mutilés que la police n’a pu déterminer à l’époque si le massacre était l'œuvre d’un humain ou d’un animal.
Cette forêt est depuis la nuit des temps le théâtre de terribles histoires, transmises de génération en génération.

Trente ans plus tard, Jeremiah Salinger, réalisateur américain de documentaires marié à une femme de la région, entend parler de ce drame et décide de partir à la recherche de la vérité. À Siebenhoch, petite ville des Dolomites où le couple s’est installé, les habitants font tout – parfois de manière menaçante – pour qu’il renonce à son enquête. Comme si, à Bletterbach, une force meurtrière qu’on pensait disparue s’était réveillée. 


Ce que j'en ai pensé :

Un réalisateur américain au repos forcé dans  un coin paumé des Dolomites, en proie à des angoisses irrépressibles depuis que, coincé dans une faille, il a assisté à la chute d'un hélico avec tous ses passagers à bord.

Une vieille histoire de massacre, non résolue, qui ressurgit.

Des habitants hostiles, secrets, du genre à planquer des photos de la scène du crime au grenier, des témoins devenus alcooliques ou morts.

Et un ton narratif où l'humour est prégnant, et où les "rebondissements" ne donnent pas l'impression qu'on essaie d'accrocher le lecteur, où le style ricoche de jeux de lettres en scènes macabres, de moments doux en crises dépressives ! C'est enlevé, parfois joyeux, c'est aussi incroyablement addictif. Même si la narration est relativement dépouillée, le style est accrocheur et intense.

Non content de nous fasciner par un cold case, l'auteur évoque les traditions de ce coin du Haut-Adige, brosse des personnages empathiques (oui, oui, le tueur y compris !), parle un peu paléontologie et géologie, nous embarque en pleine tempête de neige (la montagne est omniprésente) et surtout, déroule le thème de l'obsession, amoureuse, psychotique, meurtrière.

De quoi tirer un bon film ! et attendre avec impatience le prochain thriller de l'auteur qui signe ici un premier essai de maitre ! 

9 lettres ? 
Excellent ! 

Juste après la vague - Sandrine COLLETTE

Editions Denoël
Parution : 18 janvier 2017
304 pages


Ce qu'en dit l'éditeur :

Une petite barque, seule sur l’océan en furie.
Trois enfants isolés sur une île mangée par les flots.
Un combat inouï pour la survie d’une famille.

Il y a six jours, un volcan s’est effondré dans l’océan, soulevant une vague titanesque, et le monde a disparu autour de Louie, de ses parents et de ses huit frères et sœurs. Leur maison, perchée sur un sommet, a tenu bon. Alentour, à perte de vue, il n’y a plus qu’une étendue d’eau argentée. Une eau secouée de tempêtes violentes, comme des soubresauts de rage. Depuis six jours, ils espèrent voir arriver des secours, car la nourriture se raréfie. Seuls des débris et des corps gonflés approchent de leur île.
Et l’eau recommence à monter. Les parents comprennent qu’il faut partir vers les hautes terres, là où ils trouveront de l’aide. Mais sur leur barque, il n’y a pas de place pour tous. Il va falloir choisir entre les enfants.

Une histoire terrifiante qui évoque les choix impossibles, ceux qui déchirent à jamais. Et aussi un roman bouleversant qui raconte la résilience, l’amour, et tous ces liens invisibles mais si forts qui soudent une famille. 

Ce que j'en ai pensé :

Se pardonne-t-on certains choix ? Surtout lorsqu'ils sont si cruels que celui de devoir choisir parmi ses enfants lesquels il faudra sauver, lesquels on va abandonner, la mort dans l'âme. Surtout quand on sait que ceux qu'on laisse ont des handicaps qui réduisent encore plus leurs chances de survie ? 

Une fois de plus, je ne peux que saluer l'incroyable talent de Sandrine Collette à me raconter des histoires bien noires et dures où perce une belle humanité, à me pousser à la réflexion (qu'aurais-je fait si j'avais été à la place de la maman ?), à changer si facilement d'univers littéraire et à bousculer ainsi le confort du lecteur ! 

Parce qu'évidemment, elle ne se contente de m'emporter bien loin (il n'est ici pas question de géo-temporaliser le récit, et ça lui donne toute son universalité !), mais elle fait chanter sa narration d'une manière bien particulière, douce et coupante à la fois, et ça remue partout, dans le cœur et dans l'âme !

Énorme coup de cœur encore pour cette plume, pour ce roman ! Merci ! 

De beaux jours à venir - Megan KRUSE

Editions DENOEL
Parution : 25 août 2016
Titre original : Call me home
Traduction : Héloïse Esquié
384 pages


Ce qu'en dit l'éditeur :

Depuis des années, Amy subit la violence de Gary. Jusqu’au jour où elle reçoit le coup de trop et décide de s’enfuir avec ses deux enfants, Jackson, dix-huit ans, et Lydia, treize ans. Premier arrêt au Starlight, motel crasseux qui va leur servir de refuge. Tous les trois s'endorment sereins et soulagés, mais au petit matin Jackson a disparu. Croyant gagner l’amour d’un père qui le rejette, il est retourné chez eux et a trahi sa mère et sa sœur en révélant à Gary l’adresse du motel. Amy se rend alors à l’évidence : si elle veut assurer sa sécurité et celle de Lydia, elle va devoir abandonner son fils. Cette séparation brise le cœur de la petite fille, très attachée à ce frère doux et différent. Jackson, de son côté, doit désormais se débrouiller seul, tiraillé entre la recherche désespérée de l’amour paternel, sa culpabilité et sa difficulté à gérer son homosexualité naissante.

De beaux jours à venir est un roman terriblement juste, touchant et sans complaisance, sur la famille, les sacrifices que l’on peut faire en son nom, et leurs conséquences. Un chef-d’œuvre où l'émotion prend à la gorge à chaque page. 

Ce que j'en ai pensé :

J'ai lu ce roman il y a quelques semaines. Qu'en dire à présent ? 

J'ai aimé beaucoup de choses, les regards d'Amy et Lydia sur la situation catastrophique, beaucoup moins les apartés concernant Jackson.
Sans doute parce que, mal dans sa peau, il n'a peut-être pas été à la hauteur, parce qu'il a trahi sa mère battue, parce que je l'ai trouvé faible de se réfugier auprès du père maltraitant.  

Pourtant dans la seconde moitié du roman, quand il apprend  à ne compter que sur lui-même, j'ai failli le trouver touchant : ça tourne presque au roman d'apprentissage, il grandit loin de ses repères et sans nouvelles de sa mère et de sa soeur...

mais...

Sans être prude, ça m'a agacée de lire tant de scènes avec ce pauvre garçon, la bite à la main, et ses remords, et ses regrets...
J'aurais pu trouver l'histoire intéressante mais j'ai considéré que la rupture entre "trop de violence conjugale" dans la première moitié (qui finalement, a suscité mon intérêt), et "on oublie tout, on ne parle plus que de l'homosexualité" de la suite du roman, manquait un peu de lien.

Voila ce qui m'en reste. Je me trompe peut-être, et j'aimerais, si vous l'avez lu, que vous me disiez ce que vous en avez pensé.

Les larmes noires sur la terre - Sandrine COLLETTE

Editions Denoêl
Parution : 2 février 2017
336 pages


Ce qu'en dit l'éditeur : 

Il a suffi d’une fois. Une seule mauvaise décision, partir, suivre un homme à Paris. Moe n’avait que vingt ans. Six ans après, hagarde, épuisée, avec pour unique trésor un nourrisson qui l’accroche à la vie, elle est amenée de force dans un centre d’accueil pour déshérités, surnommé «la Casse».
La Casse, c’est une ville de miséreux logés dans des carcasses de voitures brisées et posées sur cales, des rues entières bordées d’automobiles embouties. Chaque épave est attribuée à une personne. Pour Moe, ce sera une 306 grise. Plus de sièges arrière, deux couvertures, et voilà leur logement, à elle et au petit. Un désespoir.
Et puis, au milieu de l’effondrement de sa vie, un coup de chance, enfin : dans sa ruelle, cinq femmes s’épaulent pour affronter ensemble la noirceur du quartier. Elles vont adopter Moe et son fils. Il y a là Ada, la vieille, puissante parce qu’elle sait les secrets des herbes, Jaja la guerrière, Poule la survivante, Marie-Thé la douce, et Nini, celle qui veut quand même être jolie et danser.
Leur force, c’est leur cohésion, leur entraide, leur lucidité. Si une seule y croit encore, alors il leur reste à toutes une chance de s’en sortir. Mais à quel prix ? 

 Née à Paris en 1970, diplômée en sciences politiques et partageant sa vie entre littérature et élevage de chevaux, Sandrine Collette est l'auteur de Des noeuds d'acier, Un vent de cendres, Six fourmis blanches, Il reste la poussière..


Ce que j'en ai pensé :

Je suis fan de Sandrine Collette, c'est un fait établi : chaque nouveau roman conforte sa place dans mon Panthéon des écrivains contemporains. J'aime ses thrillers, habiles et intelligents. J'aime quand elle essaie un autre style (son roman précédent était différent des précédents mais toujours excellent). Mais là...que dire ? ou plutôt, comment dire tout le bien que je pense de ce roman, à quel point il est bouleversant ?

Quand Moe a quitté Papeete pour suivre Rodolphe en métropole, elle aurait sans doute dû réfléchir à deux fois. 

" Moe n’avait rien à dire, Fallait réfléchir avant, elle le chante presque, certains jours, en passant un doigt hésitant sur sa joue bleuie. Quelques gifles ici et là — pas pire que les insultes au fond, si ça en était resté là."

Quand à traîner les bals pour suivre son conjoint violent et alcoolique qui la traite comme une esclave, elle s'est retrouvée enceinte d'un enfant illégitime, quand elle a atterri aux urgences avant d'être prise en charge par les Services Sociaux, elle aurait dû...
Une suite de mauvais choix, de circonstances, qui la mènent dans un camp de survivants. Parce qu'elle n'est plus que ça, Moe, une survivante. Et une résistante, à sa manière, pour sauver son fils, pour repartir à Papeete, un jour...

Sandrine Collette nous emmène au milieu des carcasses de voitures, dans ce monde cerné de grillages où chaque jour est une lutte, au milieu des trafiquants, des vigiles, de ceux que la misère indiffère ou fait prospérer (certains propos font frémir, ce sont ceux dont certains de nos politiciens contemporains usent en ce moment...).

 "D’une certaine façon, ils admettent que c’est mérité et, même si c’est trop facile, pensent tout bas que les autres, ceux qui vivent là-bas, n’avaient qu’à travailler."

C'est un coup de maître, un presque chef d’œuvre ! De ce genre de bouquin qu'on classe immédiatement dans les indispensables, pas tant pour le style (encore que la dame manie la langue comme personne) mais pour tout ce qu'il remue en nous, lecteurs.


Une histoire universelle, une vie ratée, une cascade de pas-de-bol pour l'héroïne, et puis, en filigrane, l'humanité toute entière en quelques centaines de pages : la rage, le désespoir, la fraternité, la misère, la solidarité, l'amour, le renoncement, l'espoir.
Du brut, une écriture à l'os qui n'épargne personne, qui fait cogiter, qui tire quelques larmes. Un bouquin qui prend violemment aux tripes, qui fait frissonner devant ce que devient notre monde (à ce rythme-là, vers 2030, époque à laquelle se situe l'intrigue, ça risque de faire super mal !).

"(...) ce n’est pas ce monde-là qu’elle veut, tentaculaire et dévorant, où la seule façon de s’en sortir est de se battre bec et ongles pour gagner quoi, pas même un petit morceau de bonheur, juste la hargne pour survivre, boire, manger et mettre de l’essence dans la voiture, un combat stérile et épuisant, trouver une place de misère et la conserver coûte que coûte."


Alors, roman noir ou pas ? Noir de violence, noir de tristesse, mais roman social avant tout, de ceux qu'il faut lire absolument pour ouvrir les yeux, pour ne pas accepter certains discours, pour qu'il reste encore une part d'humanité et de bonté en chacun de nous.
Une sacrée claque !

Il reste la poussière - Sandrine COLLETTE

Editions Denoël
Parution Janvier 2016
304 pages
Prix Landerneau Polar 2016

Ce qu'en dit l'éditeur :
Patagonie. Dans la steppe balayée de vents glacés, un tout petit garçon est poursuivi par trois cavaliers. Rattrapé, lancé de l’un à l’autre dans une course folle, il est jeté dans un buisson d’épineux.
Cet enfant, c’est Rafael, et les bourreaux sont ses frères aînés. Leur mère ne dit rien, murée dans un silence hostile depuis cette terrible nuit où leur ivrogne de père l'a frappée une fois de trop. Elle mène ses fils et son élevage d’une main inflexible, écrasant ses garçons de son indifférence. Alors, incroyablement seul, Rafael se réfugie auprès de son cheval et de son chien.
Dans ce monde qui meurt, où les petits élevages sont remplacés par d’immenses domaines, l’espoir semble hors de portée. Et pourtant, un jour, quelque chose va changer. Rafael parviendra-t-il à desserrer l’étau de terreur et de violence qui l’enchaîne à cette famille ?


Sandrine Collette est docteur en science politique. Elle partage sa vie entre l’université de Nanterre et son élevage de chevaux dans le Morvan.

Ce que j'en ai pensé : 

Dans un décor de désolation, au coeur de la pampa patagonienne, Rafael, dernier d'une fratrie menée d'une main de fer par une femme que la vie n'a pas épargnée, est le souffre-douleur de ses frères.  Ici, un enfant ne vaut pas plus qu'une pièce de bétail (et ne sent d'ailleurs pas meilleur !) et la tendresse maternelle semble définitivement absente de la vie de ses quatre garçons dont le père a disparu un jour dans des conditions mystérieuses. Le mutisme de l'un des frères pourrait y trouver son origine. 
Isolés du reste du monde, les quatre frères ne connaissent rien du monde autour et s'en accommodent, abrutis de travail.
Soudain, quand la mère perd l'un des jumeaux au poker, leur vie bascule ...
Sombre, noir à souhait, ce polar confirme le talent de l'auteur pour les ambiances qui révèlent la nature profonde des hommes, dévoilent leur brutalité et tout le paradoxe de ce roman tient dans sa faculté à nous offrir un huis-clos étouffant dans un décor immense où la nature, à perte de vue, domine l'espace et les hommes !
Le rythme est rapide, la narration précise et efficace, restituant une ambiance familiale sordide, menant droit au désastre. Finalement, la nature, sauvage et aride, semble encore plus tendre que les personnages, tous tendus dans une même violence, fascinants dans leur cruauté. Aucun d'entre eux n'inspire une réelle empathie pourtant, on comprend leurs peurs et leurs failles, la nécessité d'être fort face à l'adversité.  

Un excellent polar !
 


Mon billet sur l'Express est ici !



Six fourmis blanches - Sandrine COLLETTE

éd Denoël - Parution janvier 2015 -288 pages 

éd Livre de poche - parution janvier 2016 - 312 pages

Ce qu'en dit l'éditeur :
Le mal rôde depuis toujours dans ces montagnes maudites. 
Parviendront-ils à lui échapper ?
Dressé sur un sommet aride et glacé, un homme à la haute stature s’apprête pour la cérémonie du sacrifice. Très loin au-dessous de lui, le village entier retient son souffle en le contemplant.
À des kilomètres de là, partie pour trois jours de trek intense, Lou contemple les silhouettes qui marchent devant elle, ployées par l’effort. Leur cordée a l’air si fragile dans ce paysage vertigineux. On dirait six fourmis blanches…
Lou l’ignore encore, mais dès demain ils ne seront plus que cinq. Égarés dans une effroyable tempête, terrifiés par la mort de leur compagnon, c’est pour leur propre survie qu’ils vont devoir lutter. 

Ce que j'en ai pensé : (sans spoiler !)
Sont-elles vraiment maudites ces montagnes d'Albanie ? Ou est-ce la faute des hommes ? Ceux qui croient encore à de vieux rites sacrificiels, ceux qui partent à l'assaut des sommets sans réelle préparation et qui font confiance à un guide qu'ils ne connaissent pas ? Peut-on d'ailleurs seulement faire confiance à son petit ami quand il s'agit de survie ?
Encore un bon polar, très dur et tellement réaliste, où la nature a une place de choix ! La montagne, sauvage, où le vent rugit, où la neige efface les traces, est le personnage capital de ce 3ème roman de l'auteur ! C'est encore une intrigue menée de main de maître, même si quelques "indices" laissent devenir la fin probable, le retournement de situation...
La narration ciselée évoque avec une rare acuité la tempête de neige, la peur, le soupçon.
Un bon moment  de lecture !